Interview avec Adil Mokhles, CEO EcoSpare
- Par automationsense
- Le 17/11/2020
- Dans Interviews [French]
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1) Pouvez-vous vous présenter brièvement et nous raconter votre parcours ?
Je suis né à Casablanca au Maroc où j’ai vécu jusqu’à l’âge de 30 ans. Pendant cette période, j’ai obtenu mon diplôme d’ingénieur en mécanique et travaillé dans deux PME différentes dans le secteur des travaux public. En 2003, je suis venu en France pour intégrer le mastère spécialisé en marketing de l’innovation technologique de l’EM-Lyon.
Ces 2 diplômes m’ont permis d’intégrer le groupe Schneider-Electric, BU industrie, chez qui j’ai travaillé pendant 14 ans principalement dans le commerce et le marketing.En 2018, je suis revenu sur le banc de l’école pour préparer un MBA à l’IAE de Lyon avant de quitter Schneider-Electric fin 2019. Un mois après, j’ai créé EcoSpare, le spécialiste de la gestion de la pièce de rechange industrielle.
2) Pourquoi EcoSpare, à quel besoin répond t-elle ?
Aujourd’hui, les industriels souffrent de ce qu’on appelle, l’obsolescence de matériel électrique.La concurrence des fabricants de matériels électriques les pousse à innover sans cesse pour rester dans la course et avoir un avantage concurrentiel technologique. Les nouveaux produits sont plus performants et moins encombrants. Sauf que la compatibilité descente n’est pas toujours respectée et le changement d’un produit entraine la nécessité de changer tout le système.
Je donne un exemple concret : un industriel qui a une machine ou un process qui fonctionne avec une architecture à base d’un automate de la gamme Premium de Schneider-Electric. Si l’industriel n’a plus de pièces de rechange type carte E/S, alimentation ou autre, car cette gamme a été remplacé par une nouvelle gamme à base du M340 ou le M580, l’industriel est obligé de changer toute l’ancienne architecture, même si elle fonctionne très bien et peut encore durer quelques années. En plus du fait que cela représente un budget conséquent, cela ne participe pas à la protection de l’environnement car les produits récupérés finiront à la déchetterie à 90%.
C’est pour cette raison que nous avons crée EcoSpare, qui lancera avant la fin de l’année 2020, la première marketplace française de vente de pièces de rechange industrielles obsolètes, d’occasion, reconditionnées ou neuves.Cette Marketplace, permettra aux industriels,ETI et grande entreprise, de valoriser le stock de produits récupérés suite à une rénovation ou un stock dormant au lieu de le jeter. En même temps, les PMI et les petites ETI qui n’ont pas le moyen de rénover toute leur installation peuvent acheter ces produits « obsolètes » et prolonger la durée de vie de leurs équipements.
3) Quels types de produits peut-on retrouver sur la plateforme EcoSpare ?
EcoSpare lancera sa plateforme www.spare-place.com avant la fin de l’année. 5 grandes catégories sont prévues dans la roadmap mais seulement la catégorie « Automatismes » sera ouverte à la vente au lancement. Dans cette catégorie, on trouvera plus de 5 sous-catégories comme les automates programmables, les terminaux industriels, les démarreurs et variateurs de vitesse, les contrôleurs de mouvement et robotique ainsi que des détecteurs. Nous démarrerons avec un catalogue de plus de 5000 produits représentant plus de 200 marques. Ces produits seront disponibles, fiables et garantis. Plusieurs modes de livraisons seront possibles en standard ou en express.
4) Quels types d’entreprises peuvent bénéficier de vos services et comment ?
Comme toute marketplace, il y a des vendeurs et des acheteurs. Dans Spare-Place, la communauté des vendeurs est représentée par 2 typologies :
1- Les vendeurs professionnels : ce sont des vendeurs dont le métier est de vendre des composants électriques obsolètes.
2- Les vendeurs industriels : ce sont des industriels type grande entreprise ou grande ETI. Ils mettent en vente occasionnellement un stock dormant ou inutile, récupéré suite à une rénovation de machine ou du process.
Les vendeurs professionnels peuvent aussi être les fabricants de matériels électriques s’ils souhaitent s’inscrire dans l’économie circulaire par le reconditionnement et la revente des fins de gamme et les produits réparés suite à l’échange standard.Les acheteurs sont des industriels type PMI ou petite ETI, qui cherchent à prolonger la durée de vie de leurs équipements industriels à moindre cout.
5) Selon vous, quand est-ce que l’on peut dire qu’une usine est « Smart » ?
La notion de Smart Factory a pris tout son sens avec l’émergence des nouvelles technologies. Une usine « Smart » est une usine qui "leverage" toutes les nouvelles technologies pour être performante et répondre au besoin du client autour du triptyque : qualité, prix, délai.
En effet, pour qu’une usine soit « smart », il faut qu’elle soit automatisée afin de pouvoir produire de grandes quantités et/ou des lots personnalisés. Cette automatisation va permettre à l’usine d’être plus compétitive. Le prix va donc être accessible par le client, les délais maitrisés et le produit livré à temps.
Cette automatisation va aussi répondre à un nouveau besoin qui est la personnalisation. Aujourd’hui une usine doit être capable de fabriquer des produits qui correspondent à une combinaison d’options demandés par le client et sans arrêter les lignes de production. C’est tout simplement une usine flexible et agile.
Pour être encore plus compétitive, l’usine doit aussi être efficace opérationnellement. C’est-à-dire diminuer les temps d’arrêt de la machine ou le temps de traversée d’une façon plus générale. Ceci est devenu possible grâce à l’IIOT utilisées dans la maintenance prédictive. Elle permet d’anticiper les pannes et changer les composants qui donnent des signes de fatigues avant qu’elles tombent en panne.
Les IIOT peuvent aussi être utilisés dans la supply chain pour que les machines soient approvisionnées en temps et en heures et ne pas être en famine.
Le volet énergétique est aussi important, car une usine « smart » est une usine moins énergivore en énergie et par conséquent, elle est éco-responsable.
Pour finir, une usine est « smart » grâce aux hommes et femmes qui y travaillent. S’ils sont bien formés et bien intégrés dès le début de la transformation digitale, ils seront des facteurs clés de succès.
6) Industrie du futur, où en est la France ?
L’industrie est très importante pour l’économie française, elle représente 12,4% dans le PIB quand elle représente 20% en Allemagne. 96% des exportations vient de l’industrie et emploie 2,7 millions de personnes. Le Poids de l’industrie manufacturière est divisé en 2 depuis 1970 et passe de 22,3% à 11,2%. Cette chute vient principalement de la baisse des prix (de 2000 à 2007) et de la crise des Subprimes de 2008.
La moyenne d’âge de l’outil de production en France est de 19 ans. La France n’a pas cessé de perdre en compétitivité face à ses voisins asiatiques. La solution pour la France est de retrouver la compétitivité en tirant profil de la révolution numérique et par conséquent l’industrie du futur.
La France depuis 4 ans environ, démultiplie les efforts pour gagner en compétitivité et multiplie les plans à travers des actions entreprises par la BPI France, la French tech, la french Fab, l’AIF (alliance industrie du futur)….
La crise sanitaire actuelle a aussi montré les points d’améliorations en termes de souveraineté industrielle. Aujourd’hui, la France a besoin de relocaliser les activités stratégiques pour qu’ils soient fabriqués en France et faire des choix « make or buy ». Le plan de relance de l’état de 120 Milliards d’euros est un message fort qui montre que la France a plus besoin de l’industrie en ces moments difficiles.
La France dispose d’un atout très fort, c’est le capital humain. Elle dispose des meilleures compétences européennes et des écoles qui forment des ingénieurs talentueux.C’est d’ailleurs pour cette raison que la France a été classé par le cabinet EY, comme le pays qui attire le plus d’investisseurs étrangers, loin devant l’Allemagne et l’Angleterre.
7) Certains dirigeants de PME ont du mal à percevoir les bénéfices apportés par l’Industrie du futur et voient ce concept comme un effet de mode. Que leur répondez-vous ?
Je leur dis que l’industrie du futur est bien l’industrie d’aujourd’hui. Ce n’est ni un concept, ni une théorie. C’est tous simplement des solutions qui utilisent les nouvelles technologies pour gagner en compétitivité, en agilité et en efficacité opérationnelle.
En résumé, pour être compétitive et continuer à exister, il faut adopter l’industrie du futur et il faut commencer dès maintenant.
Les bénéfices sont bien entendu mesurables à travers des calculs et des estimations. Le cas échéant, il est possible de faire des POC et constater les gains réels.
L’implémentation de l’industrie du futur se fait par brique technologique comme la maintenance prédictive, l’automatisation, le management des assets, l’efficacité opérationnelle, la cyber-sécurité ou le développement durable.
Le plus dure est de commencer !
8) Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui voudrait opter pour une carrière dans l’industrie ?
A travers tous les plans entrepris par la France, ainsi que la prise de conscience, avec la crise sanitaire, que l’industrie reste un axe d’investissement stratégique pour la France. L’industrie ne peut que se renforcer à travers des investissements importants en France.
L’industrie à l’air de la 4ème révolution numérique a besoin d’hommes et de femmes pour accompagner cette transformation numérique. La France a besoin de compétences nouvelles dans la maintenance prédictive, dans la réalité augmentée ou virtuelle. A besoin de compétences qui maitrisent les logiciels de simulation pour des futurs besoins en implémentation de jumeaux numériques ou pour le management des assets à travers de la supervision….
L’industrie 4.0 à besoin de vous !
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